Quelles humanités numériques ?, Milad Doueihi

, par valerie Marchand

Lu par JB Chaumié

Références

Doueihi Milad, « Quelles humanités numériques ? », Critique, 2015/8 (n° 819-820), p. 704-711. URL : https://www.cairn.info/revue-critique-2015-8-page-704.htm

Recension et Citations

Milad Doueihi compare dans La grande conversion numérique : « des techniques de la médiation et de la communication qui, chacune à sa manière, modifient les rapports entre les individus et la collectivité et mettent en place une nouvelle dimension éthique capable d’influencer et de façonner les actions et les comportements. » p. 41
Mélanie Le Forestier, « Milad Doueihi, Pour un humanisme numérique  », Sciences de la société [En ligne], 92 | 2014, http://journals.openedition.org/sds/1285

  • Pour un Humanisme numérique

Milad Douehi, dans l’ouvrage, Pour un humanisme numérique, Editions du Seuil, 2011, soutient l’idée de l’émergence d’un Humanisme numérique, qui prendrait la suite de l’humanisme aristocratique de la Renaissance, redécouvrant les textes de l’humanité classique, l’humanisme exotique de la bourgeoisie, associée aux découvertes des cultures orientales, et l’humanisme démocratique de l’anthropologue, qui comprend que les faits humains forment une totalité à étudier comme telle.
Le numérique serait un quatrième Humanisme, avec quatre caractéristiques
-Une nouvelle forme de lien social, ou d’amitié, celle des réseaux. De nature complexe, les réseaux d’ "amis " ( Twitter, facebook etc) et les réseaux de recherche ( Google etc..)
-Une nouvelle forme d’anthologie, qui n’est plus de l’ordre de la rareté mais de la surabondance.
- Créant un nouveau rapport entre savoir et pouvoir :
« S’il est vrai que l’accès à l’information et au savoir a toujours été une forme du pouvoir, la culture anthologique, dans son déploiement numérique, met en place une nouvelle configuration épistémologique et formelle, capable de réorienter notre appréciation des liens entre savoir et pouvoir. » (p. 106) Plaçant le fragment au cœur de cette nouvelle culture, qui impacte également l’identité, Doueihi analyse plus précisément « la façon dont le numérique est en train de modifier nos manières de voir en introduisant de nouvelles perspectives fondées sur les propriétés des outils et des plates-formes et sur les pratiques de la sociabilité numérique  » (p. 107) à partir d’une observation du Cloud Computing.

- «  une forme inédite de la maîtrise de la mémoire » , celle-ci étant effaçable, mais seulement volontairement.

  • Le Texte numérique

« Mais on découvre également un autre aspect resté longtemps inaperçu des humanités numériques : l’éclatement de l’idée de texte au profit de sa transformation, grâce et par l’informatique, en une sorte d’expérimentation dont le but est la validation d’une idée ou plus précisément d’une hypothèse » Cette fonction épistémologique est pensée à partir du célèbre article de Turing sur l’intelligence artificielle écrit en 1950, machine calculante et intelligence ( in revue Mind ) . (voir présentation de l’article sur ce site)

« Selon Turing, il faut penser ces machines comme des enfants qui apprennent et qui peu à peu accèdent au savoir. Leur manière d’apprendre leur permet – toujours selon Turing – de s’enseigner les uns les autres la bonne façon d’apprendre. On retiendra que les premières machines ont été conçues sur le modèle des humains : comme eux, elles évoluent avec l’âge et apprennent en observant et en interagissant avec leur milieu, préfigurant en cela la culture numérique actuelle. (...).Ces machines ont alors comme particularités de pouvoir lire non seulement des textes, mais également « le monde lui-même, la société toute entière dans une circulation des apprentissages qui permet de repenser l’idée même d’algorithme ».

  • Un savoir numérique

Milad Doueihi décrit l’ambition des HN : la recherche culturelle  : la transmission des techniques et des découvertes entre humains  » . Or celle ci ne peut être que collective et collaborative. Il y a donc nécessité à former des « groupes de recherche alliant plusieurs spécialités et disciplines ». L’auteur fait donc le lien entre le moyen et la fin des Humanités Numériques : la recherche culturelle que peut produire le numérique implique, pour donner sa pleine valeur, un travail collaboratif entre disciplines .
L’objectif des études d’humanité numérique serait alors de penser le numérique non seulement dans ses usages d’archivage mais aussi dans ses aspects épistémologiques ( recherche) ainsi ses modalités (différentes rapports entre texte et code) , et enfin dans les effets sociaux et culturels liés à son usage. «  Le numérique n’est plus seulement, comme le papier ou le texte imprimé le lieu ( ou un des lieux ) du sens, mais peut être producteur de sens. »

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